vendredi, décembre 6, 2024
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Les voilà, les hôtes du Très Miséricordieux, prêts à répondre à l’appel de leur Seigneur

Comme chaque année, des millions de femmes et d’hommes se présentent devant la Demeure sacrée pour honorer le pèlerinage et vivre ainsi le cinquième pilier de l’islam, malheureusement délaissé et retardé par trop de musulmans.

Pourtant le musulman qui possède à la fois les conditions physiques et matérielles pour le faire se doit d’accomplir ce pilier essentiel qui résonne comme un accomplissement.

Car le hajj n’est rien d’autre que cela : il est l’accomplissement, au sens propre – dans le sens de la concrétisation –, d’une spiritualité qui se veut en plein cheminement.

Contrairement à ce que beaucoup de musulmanes et de musulmans pensent, le pèlerinage n’est ni une consécration ni un aboutissement. Il est une étape, la preuve d’un besoin essentiel de répondre à l’appel de notre Seigneur, tels les premiers croyants qui répondirent à l’appel de notre père Ibrahim aux premiers temps de l’histoire humaine.

Le voyage du renoncement

Le hajj invite avant tout l’homme à se déraciner, au vrai sens du terme. Il l’appelle à se détacher de son environnement, à se séparer de sa famille, à rompre avec ses habitudes et renoncer à son confort pour aller à la rencontre d’un voyage exigeant qui n’a d’autre destination que Dieu. En cela le pèlerinage se veut une école du renoncement. Il exige du musulman de cesser de se plier à ce qui fait sa vie pour répondre à un appel exigeant et ô combien plus noble. Si Ibn Khaldun disait que l’Homme est l’enfant, l’esclave de ses habitudes, le pèlerinage demande de briser jusqu’à cette idole qui parfois se reflète insidieusement dans notre confort. Et en ce sens le pèlerinage n’éduque pas dans la douceur. Se retrouver à Mina, sous une chaleur écrasante, sous des tentes et une promiscuité qu’on ne peut fuir ne peut que nous changer. À nous de voir dans quel sens : quand d’aucuns y voient de la souffrance et de l’épreuve, d’autres y voient un retour au dénuement et à la simplicité pour répondre à l’invitation d’un Seigneur Clément, Prêt à pardonner tous les péchés. Quand certains ne supportent pas la foule, le manque d’hygiène après plusieurs jours d’efforts et de nuits à l’extérieur, d’autres se rappellent combien Dieu aime voir la multitude de croyants venus du monde entier afin de vivre le Rapprochement et d’espérer le Pardon.

Et tel est le pèlerinage : le renoncement d’une somme d’habitudes qui nous constituent afin de vivre un renouvellement spirituel. Lourds de nos années de péchés nous venons tous, femmes et hommes, bénéficier de la miséricorde divine. Nous répondons à un appel qui nous demande de cesser de paraître, de délaisser notre vie de consommation, de désirs et de passions pour vivre au rythme de ce qu’Il souhaite, de la façon dont Le Très-Haut l’a décidé. Qui ne vient au pèlerinage que pour remplir ses bagages de gadgets et de robes n’a pas su s’empreindre de la dimension spirituelle du hajj.

Et quel spectacle affligeant que de voir des centaines de milliers de musulmans tourner avec recueillement autour de la Demeure sacrée alors qu’un nombre tout aussi impressionnant accomplit une procession autrement plus commerciale dans les allées des « mall » et des temples de la consommation que l’on trouve au cœur même d’al-Haram. Et l’on comprend ainsi que si certains font le voyage, tous n’entendent pas l’Appel.

L’école du rappel

Comme il est étrange de vivre le pèlerinage. Qui a fait la ‘umra avant le commencement du hajj éprouve la sensation étrange de revivre un passé lointain, un passé qui a ancré la foi dans le cœur de l’humanité.

L’Unique nous demande ainsi de revivre ce que les premiers croyants, ces hommes et ces femmes à la foi originelle, ont enduré d’épreuves et de souffrances. L’effort d’un père et de son fils, si souvent et si longtemps séparés, répondant à la demande de leur Seigneur : construire une demeure qui deviendrait le cœur spirituel de la foi originelle.

Puis le sacrifice d’une mère qui, pour sauver son enfant d’une mort qu’elle pensait certaine, a cherché de l’eau partout, un signe de vie qui lui donnerait l’espoir… D’un mont à l’autre, dans la souffrance et la peur, elle courut pour scruter l’horizon quand Dieu la délivra elle et son fils d’une mort certaine par une source miraculeuse de laquelle les musulmans s’abreuvent encore aujourd’hui.

Ainsi, à travers la ‘umra nous honorons le passé.

Le hajj, lui, rappelle un avenir certain : le rassemblement, la foule pleurant désespérément pour le pardon de ses fautes, la marche vers la rencontre de son Seigneur dans la simplicité vestimentaire la plus totale… Que ce soit à Mina, à ´Arafat, à Muzfalifa ou au cœur même de la Demeure sacrée, le musulman vit, parmi des millions d’autres mais dans une solitude absolue, l’espoir de ce qu’il est venu chercher : le pardon du Très Miséricordieux. Ainsi Dieu nous demande de visiter à la fois le passé et l’avenir. Étrange et pourtant plein de sens. Car tous deux reviennent à la source originelle de Dieu. Et tel est le hajj : un va-et-vient incessant, une rythmique entre passé et l’avenir, entre cette vie et l’autre, entre les remords et l’espoir…

Les pièges y sont nombreux : certains viennent y chercher un titre, une consécration. Ils se trompent certes de but. Mais d’autre, à l’intention sincère, peuvent se perdre en cours de chemin. Et Dieu demande de veiller, à chaque instant. Il demande de garder notre intention exclusivement orientée vers Lui, de ne pas se laisser contrer par d’autres motivations qui viendraient parasiter le but de notre voyage : Lui le Seul et l’Unique. Et Dieu tient à ce qu’Il soit le Seul à habiter le cœur du croyant. Ainsi ni l’ego ni les hommes ne peuvent avoir de place dans cet objectif ultime. Et pour y parvenir, seule la crainte révérencielle de Dieu doit nourrir et abreuver notre cœur. Afin d’y trouver la sérénité et la pleine récompense de notre action.

Me voici Seigneur, je réponds à Ton appel, Toi qui n’as pas d’associé…

Pour préserver cette noble intention, le rappel est indispensable. Et le pèlerinage n’est rien d’autre que cela : un rappel incessant qui détermine le reste de notre vie : se rappeler que Dieu est la source et qu’Il est l’Aboutissement. Et certes auprès de Lui se trouve la paix.

Et ainsi le musulman répond-il à l’appel de Dieu – par cette talbiyya – en insistant sur le fait qu’il n’est de dieu que Lui et que notre reconnaissance en Son unicité est totale, qu’elle ne souffre aucun doute.

C’est là tout le sens du hajj. Se rappeler, à travers des rites qui sortent de notre quotidien, que Dieu nous appelle à Sa reconnaissance en tant que Seigneur et Maître de l’Univers. Que c’est auprès de Lui que se trouve notre pardon. Qu’Il est notre issue, la destination de ce noble voyage. Un voyage qui demande un dépouillement total pour obtenir la pleine récompense : le pardon de Dieu. Et l’espoir incommensurable que Dieu nous regarde visiter Sa demeure avec bienveillance et satisfaction… Et qu’Il nous ouvre pour cela les portes de Sa pleine miséricorde et de Son amour…

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